Les politiques d’aménagement urbain exercent une influence significative sur la santé des populations en affectant divers facteurs, tels que la qualité de l’air, de l’eau, les opportunités de sociabilisation, l’accès à l’emploi et les modes de vie, notamment l’activité physique et l’alimentation. Il est reconnu que près de 70 % des déterminants de la santé d’une population peuvent être influencés par des politiques d’aménagement appropriées.
Ces choix, qu’ils concernent l’implantation d’espaces verts, l’optimisation du réseau de transport ou l’implantation des infrastructures, façonnent non seulement le cadre de vie, mais aussi la qualité de vie, en renforçant la résilience et le bien-être collectif de la population.
Qualité de l’air
L’enjeu : réduire la pollution à la source et limiter l’exposition des populations
Les impacts sanitaires de la pollution de l’air et des nuisances sonores sont considérables. Il a été démontré qu’une exposition prolongée à ces facteurs environnementaux contribue à l’apparition et à l’aggravation de maladies chroniques, affectant de manière disproportionnée les populations vulnérables, telles que les jeunes enfants, les personnes âgées et celles souffrant de troubles mentaux.
Initiative inspirante de la ville de Lyon : « Éclairer pour mieux respirer »
Depuis le 26 juin, la Tour Incity à Lyon éclaire ses façades pour diffuser l’indice ATMO, indiquant la qualité de l’air prévue chaque jour. Cette initiative vise à sensibiliser les Lyonnais à la pollution atmosphérique et à promouvoir des comportements respectueux de l’environnement, tout en fournissant des conseils pratiques adaptés aux prévisions…
Bruit et nuisances sonores
Designer l’environnement sonore : Le défi du quartier Concorde à Lille
En 2023, le paysage sonore du quartier Concorde à Lille a été transformé en intégrant les perceptions des habitants dans la planification urbaine. Grâce à une méthode participative, une cartographie sensible des bruits a été élaborée, distinguant nuisances et sons appréciés. Ce projet a abouti à des aménagements ciblés réduisant les nuisances sonores et améliorant le bien-être collectif, illustrant l’impact de l’ingénierie émotionnelle sur la qualité de vie urbaine.
147.1 Mds € : C’est le coût social du bruit en France chaque année. La part sanitaire de ce coût est
prépondérante :
0,9 Mds € sont des coûts sanitaires « marchands » (hospitalisation, médication…)
126,3 Mds € – soit 86% du total – sont des coûts sanitaires « non marchands » (perte de bien-être, sommeil perturbé, difficultés d’apprentissage…)
Musique en ville : entre partage et isolement
Écouter de la musique en extérieur peut transformer l’ambiance urbaine, offrant des moments de connexion et de détente dans un espace partagé. En revanche, l’usage généralisé des écouteurs, souvent à volume élevé, pose des problèmes de santé auditive et d’isolement social.
Comment repenser notre manière d’intégrer la musique dans les espaces publics pour en faire un vecteur de bien-être collectif ?
Des pistes d’amélioration pourraient inclure des espaces sonores dédiés, comme des parcs musicaux interactifs ou des playlists adaptées à des lieux publics, permettant à chacun de profiter d’une expérience sonore enrichissante et saine.
Chaleur
L’enjeu : Végétaliser
La nature en ville améliore la santé en réduisant le stress, en atténuant les îlots de chaleur et en diminuant certains risques sanitaires. Toutefois, ces bénéfices nécessitent une intégration réfléchie, tenant compte des contextes locaux et des perceptions des habitants. Végétaliser avec nuance, en hiérarchisant les priorités de santé, et en s’appuyant sur des outils d’aide à la décision, est essentiel pour maximiser ces impacts positifs.
3 à 5° : C’est la baisse de température urbaine ressentie que les arbres d’ombrage peuvent apporter au niveau du piéton (ADEME, Aménager avec la nature en ville, octobre 2018)
39% : Parmi une longue liste d’aspirations relatives au cadre de vie, 39 % des Français déclarent que « vivre en contact proche avec de grands espaces de nature » est un besoin fondamental. Il s’agit du besoin le plus répandu après « se sentir en sécurité » (L’ObSoCo – L’Observatoire des usages et représentations des territoires, 2021)
SÉSAME, outil pour intégrer l’arbre dans vos projets de renaturation urbaine
Sésame propose une suggestion d’espèces
d’arbres, d’arbustes et de plantes grim-
pantes adaptées aux attentes de l’utilisa-
teur en fonction :
-des conditions du milieu ;
-du type d’espace paysager à aménager :
avenue, cour d’école, parc…
-des services écosystémiques attendus ;
-des contraintes liées au contexte du
projet.
Accès à l’eau
L’enjeu : intégrer l’eau en synergie avec la végétalisation et les pratiques urbaines
Des innovations hydrauliques de l’Antiquité, aux enjeux contemporains liés au changement climatique, l’eau a toujours joué un rôle central dans le confort, l’hygiène et la qualité de vie des sociétés européennes. Si les réseaux modernes ont révolutionné l’hygiène et la santé urbaine, la gestion et l’intégration de cette ressource reste cruciale…
Interroger le retour de la baignade en milieu urbain
Face aux étés caniculaires, le projet URB-Bain explore la faisabilité technique et sociale de baignades urbaines en milieu naturel. Ce projet repense la baignade en ville pour répondre aux enjeux sanitaires et climatiques. Porté par l’EHESP, il s’inscrit dans l’appel à projets « Eau et Santé » de l’agence Rhin-Meuse, avec Metz comme terrain d’expérimentation.
Accès aux ressources alimentaires
L’enjeu : Renforcer la résilience alimentaire via l’aménagement local, et permettre un accès élargi à une alimentation saine
11,7% : C’est la part de personnes en France qui
vit dans un foyer en situation d’insécurité
alimentaire pour des raisons financières et
cette situation s’aggrave (Troisième étude individuelle nationale des
consommations alimentaires (Inca 3) Anses, 2017)
660km : C’est la distance moyenne parcourue par
les produits alimentaires depuis le lieu de
production jusqu’au consommateur en
région parisienne (Source : OCDE, juillet 2020)
Quelques pistes d’action
- Sanctuariser les terres agricoles aux alentours des villes
- Réfléchir aux points de commercialisation d’une offre alimentaire
saine, peu transformée et équilibrée - Mettre les projets d’agriculture urbaine au service d’une culture
alimentaire partagée, sans se focaliser uniquement sur la quantité
d’aliments produite - Cibler la production alimentaire urbaine vers les populations
vulnérables - Intégrer des écosystèmes hybrides mêlant pédagogie alimentaire,
sociabilité et circuits courts : marchés avec producteurs locaux,
soutien au jardinage, régies agricoles municipales à destination des
cantines
Transformer nos mobilités
L’enjeu : Lutter contre la sédentarité par des aménagements
urbains propices à l’activité physique
La marche et le vélo redessinent doucement le paysage urbain, en conciliant bien-être individuel et enjeux environnementaux. Mais leur essor repose sur des aménagements adaptés, garantissant sécurité et accessibilité. Au-delà de réduire la pollution et le bruit, ces mobilités actives participent à une approche globale de la santé en ville.
4e : La sédentarité, à l’origine en 2010 de 6% des décès, est considérée comme le 4 e facteur de risque de mortalité à l‘échelle mondiale
29% : c’est la progression de la fréquentation des pistes cyclables en France en septembre 2020 par rapport à la même période en 2019, dont 34% en milieu urbain, 17 à 20% dans les zones périurbaines et 16 à 18% en milieu rural (Association Vélo & Territoires, au 1er septembre 2020)
Comment Séville a créé son réseau cyclable en un seul chantier
En un seul grand chantier, entre 2006 et 2010, la ville s’est munie d’un réseau de pistes cyclables efficace, sûr et confortable, accompagné de mesures incitatives et de contraintes fortes sur la voiture, entraînant un boom des trajets à vélo dans la ville…
La vue
L’enjeu : Concevoir des environnements visuels qui favorisent la santé et le bien-être
L’impact de notre environnement visuel sur la santé mentale et physique est souvent sous-estimé. Pourtant, des études montrent que des vues dégagées sur des espaces verts sont bonnes pour la santé oculaire, mais réduisent également le stress, améliorent la concentration et accélèrent la récupération après une maladie ou une intervention chirurgicale.
+25% : Une vue sur des espaces naturels peut augmenter de 25 % la satisfaction au travail et la concentration (Journal of Environmental Psychology, 2019).
À l’inverse, un cadre saturé d’écrans publicitaires, de bâtiments ou d’encombrements visuels peut générer une fatigue cognitive et diminuer la qualité de vie. Intégrer la notion de « confort visuel » dans l’aménagement urbain – par exemple, en limitant la densité des signalétiques, ou en diversifiant les textures et couleurs urbaines – est donc essentiel pour promouvoir des villes apaisées et vivables.
Conclusion
La santé urbaine ne se limite pas à la prévention des maladies, elle englobe une vision holistique du bien-être, où l’air, le bruit, les espaces verts et les modes de transport se réconcilient pour former un écosystème. C’est en orchestrant ces éléments avec finesse et clairvoyance que nous pourrons aller vers des cités résilientes, véritablement adaptées aux besoins physiques, mentaux et sociaux de l’homme.